La suite aujourd’hui de notre saga Jeanne d’Arc. Je précise toutefois avant toute chose qu’il s’agit ici de présenter des thèses qui me semblent intéressantes et non dénuées de fondement, mais qui n’ont toutefois jamais été prouvées et qui ne sont pas à prendre pour parole d’évangile. Certains détails sont frappants et invitent à la remise en cause de l’histoire officielle, sans que toutefois la version présentée contre cette histoire puisse être considérée comme étant la bonne.
Yolande d’Aragon était la mère de Marie d’Anjou, femme de Charles VII, et donc belle-mère du roi. C’était une femme extrêmement intelligente, qui avait déjà tout compris aux ficelles des stratégies de communication modernes. Elle annonce une quinzaine d’années avant l’apparition de Jeanne d’Arc que le royaume sera sauvé par une femme. Il faut se rappeler ici que le royaume de France avait été détruit par une femme, Isabeau de Bavière, mère de Charles VII, qui, durant sa régence, s’était montrée incapable de faire face à la lutte entre Armagnac et Bourguignons qui dévasta le royaume, et, à la suite de cet épisode peu glorieux, s’illustra encore en s’alliant avec le roi d’Angleterre Henri V, en lui reconnaissant un droit d’accès au trône de France au détriment de son propre fils, le futur Charles VII, destitué par le traité. Face à cette femme salie, dont tous les crimes sont grossis, accusée d’être une putain et d’avoir couché avec la moitié des hommes de la Cour, qu’ils soient d’Armagnac ou Bourguignons, monte, insufflée par Yolande d’Aragon, la légende d’une femme pure, vierge, pendant d’Isabeau, qui reviendrait pour sauver le royaume de France. C’est grâce à cette légende que Jeanne d’Arc, quand elle arrive, ne rencontre pas énormément de problèmes pour diriger l’armée française : elle était attendue, et à une époque où la superstition était très forte, on peut comprendre l’importance qu’a eu ce mythe de la femme salvatrice pour faire accepter Jeanne d’Arc.
Les historiens suspectent aujourd’hui Yolande d’Aragon d’avoir fait élever Jeanne d’Arc. Pour certains, comme Philippe Delorme, Jeanne serait en fait la fille cachée d’Isabeau de Bavière et de son cousin Louis d’Orléans, et serait donc la demi-soeur de Charles VII. C’est sans doute aller un peu loin sans preuve. Cependant, les historiens s’accordent autour du fait que Jeanne d’Arc n’était pas une bergère lorraine comme la légende de la Pucelle d’Orléans a pu le conter : trop d’invraisemblances s’opposent à cette version.
En effet, comment expliquer les connaissances en stratégie militaire d’une simple bergère ? De même, comment aurait-elle pu savoir monter à cheval ou manier les armes ? Enfin, comment aurait-elle pu apprendre à parler français en territoire lorrain ?
Pour le fait de parler français, certains historiens ont essayé d’expliquer ses connaissances en français en faisant valoir qu’à une époque où les prêtres dispensaient l’instruction, Domrémy étant une paroisse qui relevait du domaine royal, avoir reçu un enseignement en français n’était pas une gageure. Cependant, il est prouvé que Jeanne d’Arc n’a reçu aucune éducation : sur tous les documents officiels, elle a signé d’une croix, ce qui prouve qu’elle n’était même pas capable d’écrire son prénom. Comment dans ce cas imaginer qu’elle ait pu aller à l’école ?
De plus, le fait d’élever une femme dans le monde des armes n’est pas si curieux que ça pour l’époque, où l’on retrouve la trace de quelques femmes (peu nombreuses, mais existantes) à être adoubées chevaliers. Ceci expliquerait son éducation militaire, son usage du français, mais aussi son ignorance sur certains points, comme la lecture et l’écriture, ignorance qui ne lui permettait pas de prétendre accéder au trône, et qui devait sans doute permettre aux nobles qui l’entouraient de garder un pouvoir sur elle.
Aujourd’hui, à cause du peu de documents de l’époque, il n’est rien possible de prouver. Cependant, il est intéressant de noter que dans les manuels scolaires, les allusions à la bergère et à Domrémy disparaissent peu à peu. Le mythe de Jeanne d’Arc, réinventé au dixneuvième, à un moment où la France a besoin de se recréer une identité nationale basée sur de forts personnages historiques, emblèmes de la nationalité, comme Henri IV, Louis XIV, s’étiole peu à peu faute d’incohérences et d’absurdités trop difficiles à expliquer. Cependant, l’absence d’une thèse sérieuse contrant l’histoire officielle empêche tout démenti de l’Histoire telle que nous l’avons apprise à l’école.